Bijli
Ça commence à Dhaka il y a
deux semaines. Nous avons une formation sur le « plan de contingence». En
cas de catastrophe naturelle (cyclone, tremblement de terre par exemple pour
nous) au Bangladesh ou dans les pays avoisinants, quoi mettre en place ?
Meeting très
intéressant : comment se préparer, comment agir pendant un cyclone,
pré-identifier des fournisseurs pour des distributions des kits de survie pour
les jours qui suivent la catastrophe, comment transporter ce matos, comment le
distribuer, quels moyens matériels et humains… et on conclut cette réunion en
disant qu’il faut se speeder, parce que la saison des cyclones commence le 10
avril.
Je rentre sur la base de Cox’s
le lendemain, me remet au boulot, tout va bien. Deux jours plus tard, je reçois
sur ma base la visite de Daniel, chef de mission, et de Florence (directrice
des opérations, certains membres de la famille la connaissent bien…)
Et le premier soir, Daniel me
dit : « Franklin, regarde ça, on a un premier cas pratique ! »
Et c’est quoi « ça » ?
C’est un site internet, avec
la belle carte de la région :
Et voila, heu, on a dit quoi
déjà la semaine dernière dans ce meeting très intéressant ? (c’était l’après-midi,
l’heure de la sieste, ça devrait être interdit de faire des meetings intéressants
à l’heure de la sieste…).
(Et puis moi je ne devrais pas
dire des trucs comme ça sur mon blog public, que mes collègues peuvent lire. Non
Daniel, je n’ai pas dormi pendant ta présentation, c’est pour la dramatisation
du récit, c’est mieux si je suis un peu à la rue et pas tout à fait prêt… et
puis c’est du second degré…)
Bon, restons calme, on est
mercredi, la tempête ne doit arriver sur la côte que samedi matin. Et puis ce
n’est qu’une tempête tropicale (le truc juste en dessous du cyclone), et puis elle
a bien le temps de perdre en intensité et de dévier se trajectoire en touchant
terre avant Cox’s. Oui mais elle peut tout aussi bien maintenir sa trajectoire
et se renforcer. Les jours passent, vendredi arrive, ça se précise. Le matin,
rendez-vous au HCR pour faire le point avec les différentes agences sur les
moyens disponibles pour pendant et après. Et là, la pression monte, tous les
monde parle de cyclone (nous, nous ne parlions entre nous que de tempête
tropicale), et les moyens disponibles sont assez impressionnants. Le WFP dit
qu’il a à disposition des stocks de nourriture pour une semaine, le croissant
rouge parle des évacuations de plusieurs centaines de milliers de personnes…
Il faut savoir que pas mal de
choses ne tournent pas forcement rond dans ce pays : le sens de
circulation (quand on traverse, les voitures viennent du mauvais côté), leur
façon de hocher la tête (le menton ne bouge pas et le front oscille de gauche à
droite. J’ai toujours pas réussi à savoir si ça voulait dire oui ou non), ou
les panneaux de circulation…
S’il y a bien un truc qui est
bien rodé, c’est la préparation aux cyclones. Beaucoup de bâtiments publiques,
comme les écoles par exemples, sont construits sur pilotis et servent d’abris
en cas d’alerte cyclonique. C'est-à-dire que depuis l’indépendance en 1970, les
cyclones sont responsables de plus de 500 000 morts. Le mécanisme de prévention
est donc plutôt bien rodé, à tel point que j’ai entendu dire que les Etats-Unis
se sont inspirés du système bangladeshi à la suite du cyclone de la
Nouvelle-Orléans.
Dans l’après-midi, nous
continuons nos préparations, acheter du crédit pour son portable et le charger
(l’électricité pourrait être coupée), faire une réserve de cigarettes et de
bouffe, protéger les fenêtres au bureau et à la maison, acheter des parapluies…
les denieres informations nous confirment que la tempête se dirige bien vers nous,
et qu’elle doit frapper vers minuit. Arrive le soir, et ça se met à franchement
souffler, vers 20 heures. De belles rafales de vent, de la bonne pluie… nous
commençons à légèrement nous inquiéter, nous nous disions que ça n’étais que le
début, que le gros allait venir dans quelques heures… mais non, c’était bien la
tempête qui était là, elle a touché terre entre 19 et 21 heures. C’était donc
effectivement une petite tempête tropicale, et non un cyclone, peu ou pas de
dégâts matériels dans la ville ou dans les camps, pas d’évacuation massive…
Juste un vrai exercice
grandeur nature pour un éventuel cyclone…